AAH en couple : l’Assemblée nationale dit stop à la prise en compte des ressources du conjoint
Les députés ont adopté une proposition de loi faisant de l’AAH une allocation ne dépendant plus des ressources du conjoint. Contre l’avis du gouvernement. Le texte doit désormais être examiné par le Sénat.
Pas grand monde ne l’a vue venir. Et certainement pas le gouvernement. Jeudi 13 février, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi supprimant la prise en compte des ressources du conjoint, concubin ou pacsé pour le calcul de l’allocation adulte handicapé (AAH). Contre l’avis du gouvernement.
Une proposition de loi, à la différence d’un projet de loi, est un texte soumis par des parlementaires et non par un ministère. Ceux de Libertés et territoires en l’occurrence. Ce groupe hétéroclite est composé de députés du centre gauche, du centre droit, de gauche et de nationalistes corses.
Une nouvelle tentative… après d’autres
Ce n’est pas la première fois que des élus tentent de mettre fin à cette règle de calcul de l’AAH, considérée comme injuste par de nombreuses personnes handicapées. En 2018, la proposition de loi de Marie-Georges Buffet avait été co-signée par une cinquantaine de députés de tout bord. Mais le gouvernement s’y était opposé. Et les députés de La République en marche (LREM), majoritaires à l’Assemblée nationale, avaient repoussé le texte.
Les élus de l’opposition plus nombreux
Hier, ils n’étaient pas suffisamment nombreux dans l’hémicycle. Sur leurs 298 membres, seuls 35 étaient présents. Idem chez leurs alliés du Modem : 5 sur 45. Et, en plus, 9 ont fait faux bond en votant pour (5) ou en s’abstenant (4). Faut-il y voir un simple concours de circonstances ou une manifestation des tensions actuelles entre les élus de la majorité et le gouvernement ?
Les 14 votants du groupe Libertés et territoires ont trouvé le renfort de tous les députés d’opposition présents et de l’UDI, pourtant alliée à LREM. Résultat, avec 44 voix pour et 31 voix contre, le texte a été adopté.
L’argument minoritaire de Sophie Cluzel
Sophie Cluzel, la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, avait tenté en vain de les en dissuader. Elle s’engageait à rendre un rapport, d’ici juin, sur les gagnants et les perdants d’une telle réforme.
Parmi ces derniers pourraient figurer des couples où l’allocataire de l’AAH est la seule personne qui travaille, a-t-elle avancé. Son allocation risque alors de diminuer. Avec l’individualisation de l’AAH, le plafond de ressources couple – plus élevé – disparaîtrait en effet. Mais ces situations sont marginales. Seuls 20 % des allocataires travaillent. Et la part de ceux qui vivent en couple et sont les seuls à avoir des ressources est donc encore plus faible.
Vote à l’identique indispensable
L’adoption par l’Assemblée nationale n’est qu’une première étape. La proposition de loi doit désormais passer devant les sénateurs. « Nous allons désormais voir quel groupe du Sénat peut reprendre notre proposition de loi pour qu’elle soit inscrite à l’ordre du jour », précise Bertrand Pancher, un député du Mouvement radical faisant partie de Libertés et territoires, à l’initiative de la réforme.
Il devra alors absolument être adopté, par les sénateurs, sans aucun changement pour que la loi devienne effective. Sinon, il reviendra en seconde lecture à l’Assemblée nationale. Et, là, les députés LREM ne se laisseront pas surprendre une deuxième fois…
La proposition doit être votée & validée par le Sénat (à majorité LREM) et sera ensuite de retour à l’Assemblée Nationale pour confirmer ou pas ce projet de loi par les députés. Vu la position de la Ministre chargée des personnes en situation de handicap – Sophie Cluzel – qui a voté CONTRE ce projet, il y a peu de chances que ça aboutisse…