Compensation cognitive dans la Sclérose en Plaques
Compensation cognitive dans la Sclérose en Plaques
Dans la sclérose en plaques (SEP), maladie inflammatoire du système nerveux central, des atteintes très variables peuvent être observées selon les patients. Ces atteintes peuvent être physiques (force musculaire par exemple), sensitives ou visuelles. Certains patients peuvent aussi avoir des difficultés d’attention ou pour retenir des informations ou rester concentrés. Des études tendent à montrer que des patients compensent mieux cette gêne que d’autres et que ces troubles ont alors moins de retentissement sur leur vie quotidienne. Les mécanismes par lesquels le cerveau arrive à compenser ces difficultés restent relativement méconnus. La connaissance de ces mécanismes serait utile pour développer des traitements de rééducation adaptés. L’utilisation de la technique d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) permet d’ouvrir une nouvelle voie vers la compréhension de ces mécanismes. L’IRMf met, en effet, en évidence des modifications de signal dans les régions cérébrales lors de stimulations sensitives, motrices, visuelles, auditives ou cognitives. Grâce à cette technique, il est ainsi possible de suivre l’implication de régions cérébrales précises dans l’exécution d’une fonction mais également de constater la présence de réorganisations corticales différentielles chez les patients selon la présence ou non de gênes sensitives, motrices et/ou cognitives. Comprendre ces phénomènes de réorganisation corticale pourrait s’avérer utile dans la prise en charge de la maladie.
Dans notre étude, nous avons proposé de suivre les activités cérébrales de patients atteints de SEP rémittente lors d’une tâche d’attention de complexité croissante réalisée au cours d’un examen en IRMf. L’objectif de l’étude était de mettre en évidence des activités cérébrales différentielles selon la facilité du patient à réaliser la tâche attentionnelle proposée. L’étude de ces activités cérébrales permettant alors d’évaluer les stratégies cérébrales protégeant certains patients de l’apparition d’une gêne cognitive. Dans ce travail nous avons pu montrer chez les patients atteints de SEP rémittente qu’une meilleure performance attentionnelle corrélait exclusivement avec l’augmentation de l’activation des régions cérébrales préfrontales médiales. Chez les sujets sans pathologie neurologique, une meilleure performance à la tâche attentionnelle était le plus souvent obtenue par le recrutement des régions cérébelleuses. Le cervelet est connu pour sa participation dans les processus d’automatisation des procédures tandis que les régions préfrontales médiales interviennent majoritairement dans les fonctions cognitives de haut niveau. Les patients qui ont le plus de facilité pour réaliser la tâche sont ceux qui mobilisent de nouvelles régions cérébrales spécialisées dans la tâche cognitive demandée. Ces patients développent donc une nouvelle stratégie cérébrale. L’analyse du lien fonctionnel entre ces structures cérébrales à la fois, chez les patients et chez les sujets sans pathologie neurologique, a permis de démontrer que la pathologie avait un effet sur la façon dont ces aires cérébrales dialoguaient entre elles. Les patients avec peu ou pas de gêne cognitive semblent développer un nouveau mode fonctionnel dans lequel l’utilisation de certaines régions cérébrales est déterminante pour faciliter leur réalisation de la tâche cognitive. Cependant, lorsque la complexité de la tâche attentionnelle est maximale, ce recrutement frontal médial protège moins les patients, preuve que cette stratégie peut être saturée. L’observation de cette stratégie cérébrale de compensation éclaire un peu mieux les processus mis en jeu dans la pathologie. Pouvoir mobiliser de nouvelles ressources cérébrales et les choisir en adéquation avec la sollicitation cognitive semble être la voie de compensation cérébrale optimale. La constatation que cette stratégie puisse être saturée nous rappelle la fragilité de ce nouveau mode fonctionnel et conforte l’idée de la nécessité de trouver la meilleure façon de développer et d’entretenir ces stratégies bénéfiques de protection par des prises en charge thérapeutiques adaptées.
Ce travail a été réalisé avec le soutien financier de la Fondation ARSEP. Mélissa Bonnet, collaboratrice de ce projet, avait reçu une aide à la recherche (doctorante) au cours de l’Appel d’Offres annuel 2005. Voici son travail résumé pour vous.
Brachet A et collaborateurs, France. Journal of Cell Biology, Octobre 2010.
Source : msif.org