De l’espoir pour la sclérose en plaques

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De l’espoir pour la sclérose en plaques


La sclérose en plaques est une des maladies dont la compréhension et la prise en charge ont fait le plus de progrès », estimait Thibault Moreau, chef de service de neurologie au Centre hospitalier universitaire de Dijon, président du comité médico-scientifique de l’Association pour la recherche sur la sclérose en plaques (Arsep) à l’occasion de la Journée mondiale consacrée, hier, à cette maladie auto-immune neurodégénérative.


« Les molécules qui arrivent ou vont arriver sur le marché ont des mécanismes d’action innovants qui s’appuient sur la compréhension qu’on a maintenant des mécanismes de la maladie », explique Thibault Moreau. On sait ainsi qu’après la prédominance de la composante inflammatoire en début de maladie, ce sont les phénomènes neurodégénératifs qui prennent le dessus, lorsque les mécanismes de réparation s’épuisent. Or, c’est la neurodégénérescence qui induit les handicaps permanents. C’est pourquoi les nouveaux traitements visent moins à contrôler les poussées -ce qu’on sait à peu près faire -qu’à infléchir le cours de la maladie.


Maniement délicat


C’est le cas du Gilenia, un produit mis au point par Novartis et bientôt en France. Il bloque les lymphocytes (très actifs dans les processus inflammatoires) dans les organes qui les produisent (moelle osseuse) et semble capable de ralentir l’évolution au moins à court terme de la maladie. Mais, du fait de son activité immunosuppressive, il fragilise aussi les patients face aux risques de cancer et d’infection. A ce titre, ses indications seront donc, a priori, les mêmes que celles du Tysabri, un médicament de Biogen Idec aujourd’hui prescrit dans les formes très agressives de la maladie ou après échec des traitements de première ligne.


Le Tysabri est aussi un immunosuppresseur. Il empêche, lui, les lymphocytes de franchir la barrière hématoencéphalique et sanctuarise ainsi le cerveau. Avec, lui aussi, des effets secondaires malgré un impact très positif sur le cours de la maladie : dans 1 cas sur 1.000, il déclenche une infection virale gravissime du cerveau. Mais comme on a un peu plus de recul puisqu’il est commercialisé depuis 2006, un profil des « patients à risque » vient d’être établi qui va permettre de mieux encadrer sa prescription (traitement antérieur par immunosuppresseur, au moins deux ans de sous Tysabri et une sérologie positive au virus incriminé). « Les spécialistes de la sclérose en plaques se trouvent confrontés à une situation pour eux inédite, explique Thibault Moreau. Ils disposent de nouveaux médicaments puissants mais doivent apprendre à gérer leur rapport bénéfice/risque. »


Quoi qu’il en soit, les immunosuppresseurs restent d’un maniement délicat. « C’est pourquoi les traitements de la prochaine génération comme Fumarate de Biogen-Idec ou Laquinimod de Teva sont des immunomodulateurs », observe Thibault Moreau. Leurs résultats d’essai clinique de phase III sont très positifs avec un double effet anti-inflammatoire et neuroprotecteur et une bonne tolérance. En outre, un anticancéreux de Genzyme, Campath, utilisé dans certaines leucémies, pourrait connaître une seconde jeunesse dans la lutte contre la sclérose en plaques dont il semble ralentir l’évolution. Enfin, à plus long terme, on peut envisager une réparation des lésions grâce aux cellules souches. Des travaux de recherche y sont consacrés.

Les avancées des IRM


Si ces nouvelles molécules semblent concluantes, c’est qu’on a aujourd’hui, grâce à l’imagerie du cerveau, les moyens d’éliminer précocement les molécules qui ne marchent pas, sans attendre d’en évaluer les effets sur les symptômes cliniques. « Avec l’IRM, on a en effet découvert que les poussées symptomatiques de la maladie n’étaient en quelque sorte que la partie émergée de l’iceberg, explique Bruno Stankoff, neurologue à l’Hôpital Tenon à Paris. Il y a 10 à 30 fois plus de lésions récentes que de manifestations cliniques. » Si les molécules ne limitent pas l’apparition de nouvelles lésions, elles peuvent être d’emblée écartées.


Outre cette application au développement de nouveaux traitements, le recours à l’IRM a aussi facilité le diagnostic précoce de la maladie et la compréhension de son évolution. « Et aujourd’hui, les nouvelles techniques d’IRM ouvrent de nouvelles perspectives », observe Bruno Stankoff. L’IRM fonctionnel permet par exemple d’étudier la capacité du cerveau à se réorganiser en jouant sur la plasticité neuronale pour pallier la destruction de certaines zones. Avec l’IRM de diffusion, on peut par ailleurs suivre les faisceaux de fibres nerveuses et détecter à l’échelle microscopique des anomalies dans le « câblage ».


Et demain, avec les IRM à haut champ (7 Teslas au lieu de 3 actuellement au mieux), on pourra observer des choses encore beaucoup plus fines, la mise au point de traceurs spécifiques de certains types de cellules permettant de distinguer, à l’échelle cellulaire, la myéline des neurones.

« A côté des traitements et de l’imagerie, l’Observatoire français de la sclérose en plaques est un outil épidémiologique unique au monde pour améliorer la prise en charge des malades », souligne Christian Confavreux, chef de service à l’hôpital neurologique de Lyon qui en est le pilote. Les données (personnelles, familiales etc.) qu’il regroupe sur 32.000 patients en font un outil hors pair pour mener des recherches sur l’histoire naturelle de la maladie, ses déterminants, le suivi de ses traitements.

 

Grâce à la constitution d’une cohorte ciblée, on a pu étudier les liens entre sclérose en plaques et grossesse. «  Contrairement à ce qu’on croyait, la grossesse est sans incidence sur la maladie, explique Christian Confavreux. Les patientes qui le souhaitent peuvent donc désormais avoir des enfants. » La dotation de 10 millions d’euros qui vient d’être accordée dans le cadre du programme Investissements d’Avenir va permettre d’assurer la pérennité et le perfectionnement de cet outil au cours des dix prochaines années, en lien notamment avec une banque de tissus.

CATHERINE DUCRUET

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