La régulation énergétique, un acteur clé dans la sclérose en plaques
Dans la sclérose en plaques, la mort des neurones est précédée par une perturbation des apports en énergie. Identifier précisément cette phase et rétablir le déficit énergétique avant la perte des neurones représente une piste thérapeutique forte. Benedetta Bodini de l’équipe de Bruno Stankoff et Francesca Branzoli du CENIR ont récemment réussi, grâce à des techniques d’imagerie moléculaire de pointe, à visualiser précisément certaines perturbations de l’apport en énergie au niveau des neurones chez des patients atteints de sclérose en plaques.
La sclérose en plaques est une maladie du système nerveux central qui se caractérise par une progressive destruction de la gaine de myéline qui entoure les axones des neurones. Cette enveloppe joue un rôle crucial dans la conduction de l’influx nerveux ainsi que dans la protection et le bon fonctionnement des axones.
Que se passe-t-il entre le moment où la myéline disparaît et la dégénérescence du neurone ? C’est sur cette fenêtre très précise que se sont penchés les chercheurs de l’ICM. Cette phase est caractérisée par un déficit énergétique. En effet, la perte de la myéline rend plus difficile la transmission de l’influx nerveux et les neurones ont donc besoin de plus d’énergie pour fonctionner correctement. Ce déséquilibre de l’apport d’énergie va à terme entraîner la dégénérescence des neurones.
Afin de comprendre ce qui se passe au sein du neurone, les chercheurs ont utilisé une technique nommée spectroscopie de diffusion, implémentée par Francesca Branzoli à l’ICM, qui permet entre autre de mesurer la diffusion de deux petites molécules impliquée dans l’apport d’énergie au neurone : le couple créatine/phospho-créatine.
Leurs résultats montrent chez les patients une diminution de la diffusion de ces molécules, alors que leur concentration est normale, suggérant que ce tandem est perturbé dans sa régulation. Ils ont mis en évidence cette réduction de diffusivité dans différentes parties du cerveau, en particulier en dehors des lésions visibles, dans la substance blanche et dans les thalami.
Cette altération de la diffusion est corrélée avec le handicap clinique des patients.
La prochaine étape est d’avoir une idée précise du mécanisme perturbé au cours de la maladie en couplant la spectroscopie de diffusion avec des techniques qui auront une plus grande spécificité métabolique, notamment la spectroscopie au phosphore associant le transfert d’aimantation.
« Nous souhaitons parvenir à reconstituer l’histoire naturelle du processus qui conduit à la dégénérescence. Identifier la fenêtre thérapeutique et restaurer un apport énergétique suffisant avant la mort des neurones pourrait devenir un objectif clé dans le développement des futures stratégies neuro-protectrices. » Benedetta Bodini et Bruno Stankoff.
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