Le traitement de la sclérose en plaques (SEP) appuie sur le champignon
Le traitement de la sclérose en plaques (SEP) appuie sur le champignon
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Dans quelques mois, les patients atteints de formes à rechutes de sclérose en plaques, SEP, bénéficieront du premier traitement spécifique par voie orale : le fingolimod.Ce médicament a une histoire étonnante qui commence en Asie.
Le nom d’Isaria sinclairii ne vous évoque sans doute pas grand-chose. C’est une moisissure Très présente en Asie et qui a la propriété de tuer certains insectes. En fait, la moisissure, c’est-à-dire le champignon microscopique, entre dans la larve qu’il va tuer progressivement en poussant dans son organisme. Puis, à la belle saison, sort une plante faite du champignon et du corps momifié de la larve. En Asie ce ‘couple ‘ s’appelle : ‘insecte en hiver-plante en été’.
C’est un universitaire japonais, Tetsuro Fujita, qui s’est penché le premier, il y a 25 ans, sur les vertus de ce champignon utilisé dans la médecine chinoise depuis la nuit des temps.
Avec son équipe de l’université de Kyoto il a analysé tous les composants de ce tueur de larves de cigales. Il est parti du modèle de la ciclosporine. Cette substance est le plus actif des médicaments anti-rejet utilisés dans les greffes d’organes. Et la ciclosporine vient également d’une moisissure isolée dans le sol.
Fujita a donc greffé sur des animaux des petits morceaux de peau humaine et a donné aux souris les diverses substances isolées de la moisissure.
C’est Isaria sinclairii qui s’est montré la meilleure candidate en tant que principe immunosuppresseur.
Mais il y avait un gros problème : le produit était tellement toxique que son utilisation chez l’homme était impossible. Avec l’aide de deux laboratoires pharmaceutiques japonais, Fujita a donc quelque peu ‘apprivoisé’ la molécule en la rendant moins toxique.
Les travaux ultérieurs avec ce qui était désormais devenu le fingolimod ont montré que cette substance avait un mode d’action différent des immunosuppresseurs usuels, en n’entrainant pas une destruction des cellules de défense.
Le fingolimod fait en quelque sorte rester les lymphocytes à la maison. Une propriété intéressante puisqu’il ne diminue pas le stock de cellules disponibles.
Dans la sclérose en plaques c’est une propriété intéressante. Dans cette maladie, en effet, les lymphocytes viennent attaquer l’enveloppe des axones, qu’on appelle la gaine de myéline.
Le fingolimod bloque donc ces lymphocytes sans pour autant les détruire.
Les essais cliniques avec cette molécule ont montré une nette réduction des rechutes, un ralentissement de la progression du handicap et une action favorable sur les images de lésions cérébrales à l’IRM.
Les effets secondaires concernent principalement les troubles du rythme cardiaque et nécessitent une surveillance surtout au début du traitement.
Depuis l’écorce de saule qui a conduit à l’aspirine ou acide acétylsalicylique, le penicillium de Fleming et la naissance de la pénicilline, ou l’écorce d’if mère du taxol un anticancéreux efficace, la nature nous a apporté quelques bonnes surprises naturelles. Des surprises que la main des chimistes a rendues acceptables en matière de toxicité.
On ne sait pas encore quelle sera la carrière du fingolimod dans la ‘vraie vie’ mais il est certain que les patients atteints de SEP apprécieront sans doute d’avoir enfin un traitement oral leur permettant de mieux contrôler leur maladie.
Lire l’article du Wall Street Journal en ligne : http://online.wsj.com/article/SB10001424052748704256304575320714138159240.html?mg=com-wsj
L’étude de phase 3 du fingolimod publiée le 4 février 2010 : http://www.nejm.org/doi/pdf/10.1056/NEJMoa0909494