Les avancées thérapeutiques [article de presse non médical]

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Les avancées thérapeutiques

Cette maladie énigmatique conserve encore bien des secrets, mais il y a de vrais progrès.

Fin mars, l’Agence européenne du médicament a autorisé la mise sur le marché de deux nouveaux médicaments contre la sclérose en plaques, le diméthyl-fumarate et le tériflunomide, qui viendront bientôt enrichir l’arsenal thérapeutique contre cette maladie neurologique invalidante*.

La sclérose en plaques ou SEP frappe environ 90.000 personnes en France, où c’est la première cause de handicap non traumatique de l’adulte. Maladie auto-immune du système nerveux central, elle débute dans 70 % à 80 % des cas entre 20 et 40 ans. Les femmes sont trois fois plus touchées que les hommes. Sa fréquence augmente du Sud au Nord, peut-être en lien avec l’ensoleillement. Des gènes de susceptibilité ont été identifiés, ainsi que des facteurs d’environnement favorisants – infections virales, déficit en vitamine D, tabac. Mais cette maladie multifactorielle reste pour l’essentiel mal connue.

La SEP se manifeste par des «poussées» inflammatoires: certains lymphocytes anormalement activés attaquent par endroits la gaine de myéline qui protège les fibres nerveuses, ou axones, du cerveau et de la moelle épinière, formant des foyers de démyélinisation qui perturbent la conduction nerveuse. Puis l’épisode inflammatoire cesse, faisant place à des mécanismes naturels de réparation de la myéline. «Le patient voit donc s’installer en quelques jours des symptômes neurologiques déterminés par la localisation des lésions, qui persistent le temps de l’inflammation et de la réparation, puis régressent spontanément, totalement ou en laissant des séquelles», explique le Pr Sandra Vukuzic (CHU Lyon).

Autre manifestation de la SEP, une dégénérescence neuronale progressive. Conséquence probable de l’inflammation, elle provoque peu à peu l’installation de symptômes qui ne régressent pas. «Si 85 % à 90 % des malades commencent par une forme à poussées, ou rémittente, 10 % à 15 % présentent d’emblée une SEP progressive, dégénérative. Parmi ceux atteints de forme rémittente, 30 % développeront plus tard une forme progressive», précise la neurologue. La forme rémittente touche en moyenne des sujets plus jeunes que la forme progressive. Cette dernière, moins inflammatoire, est plus difficile à traiter et plus handicapante.

Très variables, les symptômes de la SEP dépendent du siège, aléatoire, des lésions. Une fois sur quatre, la première atteinte touche le nerf optique, avec une baisse de la vision centrale d’un œil, et souvent une douleur. Les autres symptômes sont très peu spécifiques: signes sensitifs (fourmillements, engourdissements, douleurs, névralgies faciales) ou troubles moteurs (faiblesse ou paralysie plus ou moins marquée d’un ou plusieurs membres, troubles de l’équilibre, maladresse des mouvements, tremblements, troubles sphynctériens ou sexuels…). Avec le temps, la fatigue, les difficultés cognitives s’accentuent.
Approche pluridisciplinaire

Faute d’un test, le diagnostic repose sur un faisceau de critères: atteintes neurologiques multiples, chronicité de la maladie, inflammation du système nerveux. Outre les symptômes, il s’appuie sur l’IRM cérébrale, qui permet d’éliminer d’autres maladies et montre des plaques disséminées dans la substance blanche. La ponction lombaire confirme l’inflammation du système nerveux central. «Il n’existe aucun marqueur biologique de l’évolution de la SEP. Mais l’importance des lésions à l’IRM est assez bien corrélée à la progression clinique, explique le Pr Jean Pelletier (CHU Marseille). Cependant, toutes les lésions ne s’expriment pas. En moyenne, un patient fait une poussée par an. Durant ce temps, vingt à trente lésions apparaissent. Certaines vont disparaître, d’autres rester ou augmenter, de façon imprévisible… Le cerveau arrive cependant à compenser certaines lésions dues à la maladie.»

Aucun traitement ne guérit la SEP. Mais l’arrivée voici vingt ans des premiers immunomodulateurs, interférons bêta puis acétate de glatiramère, a permis de réduire le nombre des poussées et sa progression. Plus récemment, le natalizumab et le fingolimod sont venus accroître l’efficacité des traitements, et d’autres vont suivre. Jusqu’à présent, on estimait qu’au long cours un quart des SEP restaient peu sévères, un tiers évoluaient vers un handicap lourd, et un gros tiers vers des gênes diverses mais préservant une relative autonomie. «Nous ne pouvons plus dire cela aujourd’hui, estime le Pr Vukuzic. Les nouveaux traitements espacent les poussées et modifient l’accumulation des handicaps à moyen terme. Nous n’avons pas encore assez de recul pour dire s’ils vont aussi changer le cours de la maladie à très long terme, mais il y a des raisons de le penser.»

Dans ces conditions, le traitement des multiples symptômes et la prise en charge globale de ces patients souvent jeunes, dont la maladie va venir entraver les projets professionnels et familiaux, importe au même titre que le traitement de fond. «L’approche pluridisciplinaire est donc importante pour répondre mieux aux préoccupations du malade, qui ne sont pas toujours celles du neurologue», souligne le Pr Pierre Clavelou (CHU Clermont-Ferrand). Comme la prise en charge se fait surtout au domicile, le travail des réseaux de soins mis en place est déterminant pour la qualité de vie des malades. «Mais une vraie structuration et la reconnaissance comme centres de référence des services de neurologie impliqués faciliteraient celui-ci», souligne le neurologue.

* La Semaine nationale de la sclérose en plaques s’achèvera le 29 mai par une Journée mondiale. Cette semaine est une opération portes ouvertes, destinée aux malades et à leur entourage, qui se déroule depuis quatre ans dans huit villes de France. Le programme détaillé de chaque réunion est mis en ligne et accessible sur: http://www.lamaisondelasep.fr

 

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