La journée mondiale de la SEP 2020, sous l’angle des connexions

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Qu’elles soient sociales ou cérébrales, les connexions sont au cœur de la sclérose en plaques. C’est le thème de la Journée mondiale en 2020 pour sensibiliser au risque d’isolement social.

« Au début de la maladie je me suis sentie très isolée et je me suis écroulée, raconte Florence, âgée de 41 ans et mère de 4 enfants. En 2018, j’ai appris que j’avais une sclérose en plaques (SEP) et j’ai perdu totalement la vision d’un œil. J’ai eu du mal à digérer car j’ai déjà une maladie de Crohn. J’ai eu du mal à accepter, je suis tombée très bas, je ne sortais plus et j’étais tombée dans la phobie sociale. Je ne pouvais plus compter sur certains amis que j’ai perdus : une amie de plus de 25 ans m’a dit qu’elle ne voulait pas attraper ce que j’avais et ne voulait pas me voir mourir, je n’ai jamais eu de nouvelles depuis… C’est violent ! Une de mes trois sœurs n’a pas accepté ma maladie : je n’avais pas le droit d’être triste et de pleurer et cela fait deux ans que l’on ne se parle plus. Et mon compagnon de l’époque a fui après le diagnostic… »

L’isolement provoqué par cette maladie neurologique est une réalité cruelle chez de nombreux patients. « Certains sont très isolés physiquement sans proches, célibataires et sans relation sociale mais une grande majorité silencieuse est composée de gens qui sont seuls alors qu’ils sont entourés, évalue Guillaume Molinier, directeur de la Ligue française contre la sclérose en plaques. Parce que c’est une pathologie que l’on n’arrive pas à expliquer facilement, avec des symptômes impérieux, notamment la fatigue. C’est une maladie chaotique et imprévisible ! Pour l’entourage même empathique, c’est compliqué d’assimiler qu’un jour vous mettez sur Facebook que vous avez fait une balade et que le lendemain vous êtes trop fatigué pour faire quelque chose. Même dans le couple, c’est compliqué, le patient ne veut pas forcément en parler ou l’autre ne veut pas entendre… Enfin d’autres patients sont isolés parce que l’accessibilité n’est pas au rendez-vous et ils n’en peuvent plus de se battre pour aller faire leurs courses ou retrouver des proches. » Un autre facteur d’isolement social réside dans le risque de perdre son emploi du fait de la maladie.

Pour la Journée mondiale de la SEP, la Fédération internationale de la sclérose en plaques, a donc choisi le thème des connexions, récurrent sur trois ans, pour illustrer les difficultés de connexions avec les autres et dans les neurones. « Cette année, nous avons anglé sur les connexions sociales, avec l’idée de travailler sur un indicateur de connexions en nombre et en qualité », reprend Guillaume Molinier. Cet indicateur pourrait potentiellement servir d’alerte et éviterait de se retrouver dans des situations dramatiques, comme celle de Florence :

« Un jour, j’ai pris des médicaments, je n’avais plus la force, déplore la jeune femme. Mais cela m’a servi de déclic car mon fils de 13 ans m’a dit : si tu n’es plus capable de te battre pour nous, alors ne te bats plus… J’ai perdu 65 kg, j »ai repris ma vie en mains, j’ai compris qu’il fallait que j’arrête de m’isoler et que j’avance ! »

Relancer la dynamique sociale

« Maintenant, la SEP m’a fait vraiment relativiser et je vois la vie différemment ! s’enthousiasme Florence. Elle m’a rapprochée d’une de mes sœurs et ma troisième sœur me tire vers le haut, tout en entendant et en comprenant les symptômes, l’épuisement. Il y a des gens à qui on parle mais sans être compris et cela fait perdre confiance en soi, mais j’ai aussi rencontré des personnes qui m’entourent et qui sont géniales : à la piscine, à l’école en emmenant mon fils et en discutant avec des parents. Certains sont devenus des amis. »

Le déclic de Florence est également venu des réseaux sociaux, avec le groupe baptisé les SEP warriors sur Facebook, en lien avec l’association SEP avenir. Celle-ci propose un ingénieux système de parrainage : un parrain ou une marraine accompagne une personne qui vient d’avoir le diagnostic ou qui est confrontée à des difficultés dans son parcours de patient. « Fabien est devenu mon parrain et m’a prise en main, c’est un petit bonheur cet homme ! s’exclame Florence. Je peux parler de tout et pas seulement de la maladie. La SEP vit en moi mais je ne vis pas pour elle, en aucun cas ! »

Les réseaux sociaux sont une vraie ressource pour les patients mais Internet permet aussi de s’informer sur les réseaux SEP, les associations de patients avec une sclérose en plaques. « Si l’isolement est purement dû au fait que l’on ne sait pas communiquer sur sa maladie ou que l’on n’est pas entendu, on peut se tourner vers les associations et les communautés de patients sur Instagram et Facebook, suggère Guillaume Molinier. Ce n’est pas aussi satisfaisant au départ que du face-à-face au début, mais derrière, il y a des rencontres ! Nous organisons des apéros SEP et des cafés SEP, il y a aussi des rencontres organisées par des associations locales. Il faut commencer par réamorcer des relations sociales avec ses pairs sans jugement et sans peur, pour relancer cette dynamique sociale : il y a un ré-entraînement à la sociabilité et à la vie sociale, comme il y a un ré-entraînement à l’effort. »

D’autres options existent pour enrichir sa vie sociale : les associations en lien avec les centres d’intérêt de chacun, qu’ils soient artistiques, culinaires, culturels, sportifs. L’association des paralysés de France , comme d’autres, proposent des activités ou voyages accessibles. Les mairies organisent souvent des activités à prix abordable. Prendre soin des relations déjà existantes, familiales ou amicales, semble incontournable, même si la maladie n’est pas parfaitement comprise ; verbaliser avec d’autres patients avec une SEP, voire avec un psychologue, compensera et permettra d’évacuer les émotions. De leur côté, les proches, amis, connaissances de patients peuvent garder en tête ce risque d’isolement et prendre des nouvelles des patients pour mieux les inclure dans la société.

Une maladie grave sert parfois aussi de déclic pour se rapprocher de ses envies les plus profondes et d’une vie épanouie : « Cette SEP m’a aussi permis d’assumer mon homosexualité ! conclut Florence. Je me cachais derrière ma vie pour rentrer dans les cases de la société mais ce n’était pas ma vie. Et cela m’a fait un bien fou : je n’ai jamais été aussi heureuse que maintenant… »

 

Source : AlloDocteur

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