Vers un nouveau traitement contre les formes les plus graves et les séquelles du Covid-19 ?
Invité de Sonia Mabrouk, jeudi matin sur Europe 1, Jesus Martin-Garcia, directeur général de GeNeuro, une biotech franco-suisse, a expliqué comment le traitement développé par des chercheurs pour lutter contre la sclérose en plaques pourrait permettre de lutter contre les formes les plus graves du Covid-19.
INTERVIEW
« Nous ne sommes pas une société, qui, au départ, est tournée vers le Covid-19 », pose Jesus Martin-Garcia, directeur général de GeNeuro. Pourtant, un traitement développé par cette biotech franco-suisse suscite un nouvel espoir pour lutter contre les formes les plus aiguës du virus. Invité de Sonia Mabrouk, jeudi matin sur Europe 1, le responsable a expliqué comment son entreprise s’est soudain retrouvée en première ligne face à la pandémie.
Des maladies neurodégénératives comme la sclérose en plaques
L’activité « normale » de GeNeuro est centrée sur les traitements neurologiques. « Nous sommes vraiment déterminés, depuis le départ, à neutraliser des protéines qui ont contaminé nos ancêtres et qui sont restées dans notre ADN », explique-t-il. « Il y en a deux en particulier qui nous intéressent : le W ENV et le K ENV. Le W ENV est une protéine que l’on retrouve principalement dans des maladies neurodégénératives, comme par exemple la sclérose en plaques. »
Or, selon des études publiées la semaine dernière par l’Université de Rome et le Centre international de recherche en infectiologie de Lyon, cette protéine est également présente en grande quantité… dans le sang des patients atteints du Covid-19. « C’était une grande surprise », commente Jesus Martin-Garcia. « C’est une protéine qui est très inflammatoire. (…) Il est possible que cette protéine, comme c’est supposé par ces publications, joue le rôle d’huile sur le feu dans la partie aiguë de la maladie. »
Mais ce n’est pas tout : le W ENV pourrait aussi expliquer pourquoi des patients souffrent de syndromes post-Covid après la période d’infection, alors qu’ils sont testés négatifs. « On voit qu’au moins 10% des cas développent des syndromes très handicapants, de nature généralement neurologiques ou neuropsychiatriques », comme des neuropathies, des pertes cognitives ou même des syndromes psychotiques. « Et jusqu’à aujourd’hui, on n’avait aucune idée du pourquoi », selon le directeur général de GeNeuro.
« Nous avons des médicaments contre »
En quoi l’identification de cette protéine change-t-elle la donne ? « Nous avons des médicaments contre, qui ont déjà été utilisés sur des centaines de patients atteints de sclérose en plaques, avec des résultats très prometteurs », répond Jesus Martin-Garcia. « Ils pourraient maintenant être utilisés dans le domaine du Covid. » Un traitement intéresse particulièrement les chercheurs : il s’agit du temelimab, un anticorps monoclonal.
Avant de pouvoir l’utiliser, deux types d’essais cliniques doivent être menés. « Un premier à relativement court terme, sur des patients qui commencent à développer des symptômes et à qui on pourrait administrer du temelimab pour voir si cela évite l’évolution vers les formes graves », qui pourrait commencer dès cet été. Et un second type d’essais pour les formes longues, « sur des groupes de patients avec des syndromes cohérents neurodégénératifs », « peut-être dès l’automne ».
Derrière ces recherches, Jesus Martin-Garcia entrevoit l’espoir ultime de juguler la maladie lorsque la population sera massivement vaccinée. « Le scénario optimiste que nous suivons tous, c’est que l’on passe d’une situation pandémique à une situation endémique, du style de la grippe saisonnière, avec beaucoup moins de cas. Mais le problème restera de savoir comment traiter les personnes qui sont infectées lorsqu’elles commencent à développer des symptômes, pour qu’elles n’évoluent pas vers des formes graves de la maladie », nécessitant de lourds moyens de prise en charge. Le temelimab pourrait, si les essais sont payants, s’avérer être la solution.