Article paru sur 20minutes : Et s’il était possible de vaincre la maladie?

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De nouvelles recherches pourraient permettre de bloquer l’évolution de la maladie.

Peu de maladies suscitent autant de peur que la sclérose en plaques (SEP). Pour beaucoup, c’est une maladie rare qui bouleverse le quotidien des patients. « Le grand public n’imagine pas que la SEP est une maladie répandue, elle touche pourtant 100.000 personnes en France, soit environ une personne sur mille.

Tout le monde aujourd’hui connaît quelqu’un qui a la SEP », souligne le Pr Thibault Moreau, chef du service de neurologie au CHU de Dijon et président du Comité médico-scientifique de l’ARSEP, la Fondation pour l’aide à la recherche sur la sclérose en plaques. Mais s’il était possible de vaincre la maladie ? A l’occasion de la Journée mondiale de la SEP ce mercredi, 20 Minutes s’intéresse aux dernières avancées qui pourraient un jour permettre aux malades de mener une vie la plus normale possible.
Une maladie de la femme jeune

Si personne n’en est à l’abri, « la SEP est de plus en plus une maladie de la femme jeune. Elle touche trois fois plus les femmes que les hommes et dans les deux tiers des cas, elle se déclare entre 20 et 35 ans, entraînant de nombreux retentissements sociaux et professionnels sur le quotidien des patients », poursuit le neurologue.
Emilie Venesson, coauteure de Vaincre la sclérose en plaques (éd. Thierry Souccar), avait 23 ans quand la maladie est entrée dans sa vie. Plusieurs années et « poussées » plus tard, la jeune femme doit marcher avec une canne. Quand le diagnostic est tombé, un sentiment de soulagement mêlé de crainte l’a envahie. « On se dit qu’on n’est pas fou, qu’il y avait bien quelque chose qui n’allait pas, mais en même temps, la SEP a une image nébuleuse, mortifère. La première fois que j’en ai entendu parler, j’étais petite fille, se souvient la jeune femme, la mère d’une amie l’avait, elle était en fauteuil roulant et elle est décédée jeune ».
Réparer les lésions

« La SEP est une maladie du système nerveux central, c’est un emballement du système auto-immun, qui se retourne contre soi et s’attaque à la myéline », explique le Pr Moreau. La myéline, c’est la membrane qui isole chaque nerf du cerveau et de la moelle épinière, comme la gaine plastifiée qui entoure un fil électrique. Dans la première phase de la maladie, ces attaques inflammatoires se manifestent sous forme de poussées. « En général, une poussée dure trois à quatre semaines, avec des manifestations qui varient en fonction de la localisation de l’inflammation », indique le neurologue. Baisse de l’acuité visuelle, sensation de décharge électrique ou d’eau qui ruisselle sur les membres, engourdissement, sensation de « patte qui traîne » ou encore une fatigue extrême : chaque poussée met le corps à rude épreuve.

Pourtant après une poussée, les lésions se réparent. Durant cette récupération spontanée, « le corps fabrique à nouveau de la myéline et restaure les fonctions neurologiques altérées par la poussée », relève Julien Venesson, époux d’Emilie et coauteur de Vaincre la sclérose en plaques. Les symptômes se résorbent, avec peu ou pas de séquelles. Dans un premier temps du moins. « Avec le temps, ce processus de « remyélinisation » est plus difficile, plus lent », note le jeune homme. Et « après quinze ans de maladie, la SEP évolue vers une forme plus progressive et dégénérative, qui entraîne un handicap permanent », complète le Pr Moreau. Du coup, « on travaille pour identifier et comprendre comment certaines cellules ont la capacité de réparer les zones lésées ».
Mener une vie normale

Julien Venesson, lui, a peut-être touché du doigt le mystère de la remyélinisation. Pour sa compagne Emilie, ce journaliste scientifique s’est plongé dans la littérature scientifique foisonnante consacrée à la SEP, et a élaboré à partir de tous ces éléments un programme nutritionnel et physique ciblé en vue de vaincre la maladie, afin que son épouse puisse à nouveau mener une vie normale. « Dans un premier temps, il fallait stopper les poussées, ce qui passe par des médicaments, mais aussi par le mode de vie », détaille-t-il. Et rien n’a été laissé au hasard. Côté assiette, le sel a été banni : « il augmenterait de 400 % les risques de poussées », et l’accent a été mis sur les produits frais et les poissons gras, riches en bonnes graisses, « proches de celles qui constituent la myéline », insiste le journaliste scientifique. Et puisque la carence en vitamine D fait partie des facteurs pouvant favoriser la survenue de la SEP, quelques compléments alimentaires à base de vitamines, D notamment, ont complété le volet alimentaire de ce programme. « Il y a du bon sens dans ces mesures », concède le Pr Moreau, toutefois « peu favorable aux régimes alimentaires exclusifs ou contraignants ».
Mais « le plus dur, ça a été les exercices physiques, raconte Emilie, qui au départ ne maîtrisait plus l’une de ses jambes. C’est un sentiment terrible quand vous êtes jeune et que votre propre corps ne vous répond pas ». Pourtant, à force de persévérance, au bout de quelques semaines, la jeune femme ressent les premiers bienfaits de ce programme conçu pour elle. « Au bout de trois mois, tous mes symptômes avaient disparu. Avant, je faisais deux poussées par an. Depuis trois ans, je n’en ai eu aucune. Je peux à nouveau marcher, faire de la randonnée et tout ce que je ne pouvais plus faire depuis longtemps, se réjouit-elle. Je ne suis pas guérie pour autant, je reste quelqu’un qui a besoin de plus de repos que les autres, mais je sais maintenant qu’on peut bloquer l’évolution de la maladie. Aujourd’hui, quand il m’arrive d’évoquer ma SEP, je ne me sens plus définie que par elle ».
Si ce programme pour vaincre la SEP a fonctionné, « c’est tant mieux, commente le Pr Moreau. Les personnes touchées par la SEP sont souvent jeunes, c’est primordial de tout faire pour leur offrir une vie la plus normale possible, qu’elles ne se sentent pas marginalisées ni diminuées », poursuit-il. Avant d’appeler à la prudence. « De nombreuses études ont avancé des hypothèses intéressantes, sans pour autant être confirmées par la suite, tempère le neurologue. La SEP évolue différemment d’un patient à l’autre. C’est dans la durée que l’on pourra savoir ce que cela vaut ».

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