Une étude financée par la Société de la SEP permet la découverte d’une cible thérapeutique prometteuse contre l’invasion du cerveau par des immunocytes

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Contexte

De nombreux types de cellules immunitaires contribueraient à l’apparition de la sclérose en plaques (SEP). Alors que le rôle de certaines de ces cellules est bien établi, celui des autres fait toujours l’objet de vifs débats. Il en est ainsi d’un groupe d’immunocytes, soit les lymphocytes T CD8+ (cellules T). Bien que ces cellules soient présentes dans les lésions de SEP, leur fonction précise – pro-inflammatoire ou immunosuppressive – demeure obscure.

Des données récentes montrent qu’elles interviendraient dans le déclenchement de la SEP, mais les chercheurs tentent toujours de comprendre les mécanismes par lesquels ces cellules parviennent à franchir la barrière hémato-encéphalique (BHE) pour accéder au système nerveux central et y provoquer de l’inflammation.

Une équipe de l’Université de Montréal dirigée par le Dr Alexandre Prat, chercheur subventionné par la Société de la SEP, s’est demandé si une protéine présente à la surface des cellules T CD8+, appelée molécule d’adhésion cellulaire du mélanome (MCAM), ne pourrait pas faciliter le passage de ces cellules nocives dans le système nerveux central. Cette étude a été présentée dans la revue Annals of Neurology.

Description de l’étude

Les chercheurs se sont d’abord assuré que les cellules T CD8+ portaient bien MCAM à leur surface, à l’examen autopsique de cerveaux de personnes ayant présenté une forme cyclique (poussées-rémissions) de SEP. Ils ont également mesuré le pourcentage de cellules T CD8+ MCAM-positives dans le sang prélevé sur des personnes atteintes de SEP.

Par la suite, l’équipe a effectué des analyses de cultures cellulaires dans le but d’observer les effets de MCAM sur le comportement des cellules T CD8+. Son but était de déterminer si les cellules T CD8+ exprimant MCAM 1) traversaient plus facilement la BHE que les autres, 2) étaient toxiques pour les oligodendrocytes (cellules productrices de myéline, gaine des fibres nerveuses détériorée par la SEP) et 3) libéraient des molécules pro-inflammatoires et toxiques pour d’autres cellules.

Les chercheurs se sont ensuite penchés sur la contribution possible des cellules T CD8+ MCAM-positives dans l’apparition d’une maladie animale semblable à la SEP. Ils ont administré à des souris soit les cellules T CD8+ MCAM-positives, soit des cellules MCAM-négatives qui étaient programmées pour attaquer la myéline. Les souris des deux groupes ont présenté une maladie semblable à la SEP. La gravité de cette maladie a été mesurée selon l’importance de l’incapacité de la queue et des membres des animaux, puis les chercheurs ont comparé les résultats obtenus dans les deux groupes.

Pour voir s’il serait bon d’empêcher MCAM d’adhérer à la BHE, les chercheurs ont administré une molécule bloquante aux souris atteintes d’une forme progressive d’une maladie semblable à la SEP. Les animaux ont ensuite été répartis dans deux groupes : le premier recevait la molécule bloquante avant l’apparition de la maladie, et le second, après l’apparition de la maladie.

Résultats

Des cellules T CD8+ exprimant MCAM ont été repérées dans le cerveau de personnes atteintes d’une forme cyclique de SEP, tant à l’intérieur qu’en périphérie des lésions actives. À la suite d’une poussée, leur concentration a atteint des niveaux élevés dans le sang prélevé sur des personnes présentant une forme cyclique de SEP.

Dans les cultures cellulaires, les cellules T CD8+ MCAM-positives adhéraient aux cellules de la BHE et les traversaient plus facilement que les cellules MCAM-négatives, elles étaient toxiques pour les oligodendrocytes (cellules productrices de myéline) et elles produisaient des molécules pro-inflammatoires et toxiques pour les cellules.

Les symptômes de la maladie semblable à la SP prenaient plus de temps à apparaître et étaient moins graves chez les souris dont les cellules T CD8+ étaient dépourvues de MCAM que chez les autres souris. De même, une molécule bloquant MCAM a permis de diminuer la gravité de la maladie chez les souris atteintes d’une maladie semblable à la SEP. Autre observation importante : la molécule bloquant MCAM s’est révélée efficace aussi bien avant qu’après l’apparition de la maladie.

Commentaires

L’étude montre que MCAM peut être présente à la surface des cellules T CD8+ pro-inflammatoires et qu’elle favorise leur passage au travers de la BHE, déclenche le processus inflammatoire et détériore les oligodendrocytes, cellules productrices de myéline. En outre, il semble exister un lien étroit entre la présence de MCAM et la gravité des symptômes de SEP, ce qui rend les résultats des expérimentations sur le blocage de MCAM extrêmement encourageants.

MCAM est également présente à la surface des cellules T CD4+, autre groupe de cellules immunitaires connu pour son rôle dans le déclenchement de la SEP. Le blocage de MCAM pourrait donc peut-être limiter la capacité des cellules CD4+ pro-inflammatoires et des cellules T CD8+ de traverser la BHE et de détériorer le tissu cérébral.

Le blocage de MCAM a aussi permis de réduire la gravité des symptômes chez les souris atteintes d’une maladie semblable à la SEP, et ce, aussi bien lorsque la molécule bloquante était administrée avant l’apparition de la maladie qu’après. Comme les auteurs le soulignent, ces résultats laissent croire que des molécules bloquant MCAM pourraient permettre de maîtriser la survenue d’incapacités à long terme et de stopper l’évolution de la maladie dès l’apparition des tout premiers symptômes. Il faudra toutefois pousser plus loin la recherche dans ce domaine avant de pouvoir transposer chez les êtres humains les résultats obtenus chez les animaux.

Source

LAROCHELLE, C. et coll. Melanoma cell adhesion-molecule positive CD8 T lymphocytes mediate central nervous system inflammation. Annals of Neurology, 2015. DOI:10.1002.
_Autre source : http://www.ladepeche.fr/article/2015/05/28/2113469-un-grand-pas-contre-la-sclerose-en-plaques.html

 

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